Ce matin l’équipe à terre à reçu ce long message d’Yvan, à lire sans modération.
La nuit ou le plaisir est revenu !
À 23h ce 11 novembre, Gilles me passe la barre au large de Madère. C’est l’heure du quart et nous sommes avant dernier au classement. Loin de nous l’idée de signer l’armistice !!
Les deux premiers jours de la transat Jacques Vabre nous ont amenés à deux reprises dans des zones de non vent. Pour un peu je me serais cru au bol d’or du lac Léman en Suisse. C’est sympa le temps d’un week-end quand tu sais qu’après la vie normale reprend. Là, ce n’était que le début et la réussite ne nous aura pas franchement accompagné sur ce début de course. Mais Éole ne nous oubliera pas et, à peine aux commandes de la machine, les conditions s’accélèrent très vite.
Le vent rentre : 25 – 26 – 30 ! Le speedo grimpe et les sensations arrivent enfin dans une course où les rois du lac avaient – ont – auront leur place cette année ?!
Les 9h sans lâcher la barre de Groupe GCA – 1001 Sourires cette nuit là à plus de 30 noeuds m’ont rappelé pourquoi j’avais choisi ce métier. Quel pied, nom de D… !
Quelle chance d’être parmi ces privilégiés. Quelle chance d’avoir des pilotes automatiques qui nous secondent et restent « pour l’instant », relativement moins performants que nous sur ces multicoques sous certaines allures, un sujet qui m’inquiète un peu pour l’avenir…. si on n’a plus ce plaisir merveilleux de barrer en prenant des surfs à +30 noeuds, il ne resterait que trop peu… J’ai pris une belle dose d’adrénaline pour un bon moment et je suis persuadé qu’il y en aura encore beaucoup d’autres comme cela avant la fin de la Transat.
Merci à Gilles Lamiré qui me donne toute sa confiance, je me battrai sans limites pour ne jamais le décevoir.
Le petit matin arrive, nous sommes passés de la 7ème à la 4ème place en une nuit ! C’est (on ne va pas le cacher) l’euphorie à bord ! Quand une dorsale anticyclonique est aussi instable ça laisse beaucoup de place à l’incertitude. Nous voilà passant les Îles Canaries et là, de l’extase à la désillusion la plus extrême…
8h sans vent…8h à montrer aux Imoca de ne pas venir nous rendre visite…8h à lutter dans 3 noeuds de vent. C’est frustrant, horrible, c’est le jeu et pourtant il ne faut rien lâcher ; faites nous confiance pour ça.
C’est la seule course au large de toute ma carrière où j’ai autant dû lutter avec la pétole, et les fichiers disent que ce n’est pas fini… En bon Suisse, ça devrait pourtant nous aider certes, mais quand les copains à la côte africaine sont à 20 noeuds pendant que tu cherches le vent, la course se renverse. Pour autant elle n’est pas terminée, loin de là. Il reste encore plus des deux-tiers à parcourir. Fort-de-France, c’est encore loin et les pièges nombreux. Personne ne sait pour l’instant comment franchir ce pot au noir qui n’est pas clair. Une opportunité pour nous de revenir dans le match soyez-en sûr !
Merci à tous pour vos nombreux encouragements. L’équipe nous les transmet et on les ressent très fort de notre trimaran sur l’Atlantique. Gilles barre, je reprends un carré de chocolat, une petite sieste et au charbon pour de prochains surfs !
Yvan, Never Give Up